Publication de la correspondance et des papiers d’État du cardinal de Richelieu
La correspondance et les papiers d’État du cardinal de Richelieu constituent un ensemble de sources exceptionnelles non seulement par leur abondance, près de 500 volumes manuscrits aux archives diplomatiques, mais surtout par la variété de leur contenu. Fondamentaux pour la connaissance du XVIIe siècle, ils offrent une vision très directe, quasi-photographique, du royaume de France et de l’Europe des Habsbourg, à l’époque de la guerre de Trente Ans. Ils permettent de redécouvrir le règne de Louis XIII au jour le jour, les principes du ministériat, leurs limites, de mieux comprendre l’instauration d’un pré-absolutisme.
Les problématiques abordées par ces textes rejoignent celles du centre Roland Mousnier et de l’Institut de Recherches sur les Civilisations de l’Occident Moderne (IRCOM) : histoire politique, histoire des relations internationales, histoire du droit et des institutions, histoire religieuse, culturelle, économique, financière, monétaire, histoire sociale, histoire des idées. De contenu à la fois historique, juridique, théologique et philosophique, il se prête à une exploitation pluridisciplinaire.
De son vivant même, le cardinal-ministre a fait de sa correspondance un outil décisionnaire ; des rapports qu’il a rédigés pour le Roi, ou de ceux qu’il a suscités, une œuvre prospective, vouée à la Raison, au service de l’État et à la grandeur du royaume ; une entreprise historique justificative du nouvel ordre monarchique.
Conservé dans leur immense majorité par le ministère des Affaires étrangères, avec les papiers légués par Claude Bouthillier, secrétaire d’État puis surintendant des finances, et par Léon Bouthillier, comte de Chavigny, secrétaire d’État de Louis XIII en charge de la diplomatie après son père, l’ensemble légué par Richelieu est indissociable de l’apport ses collaborateurs. Une place particulière y est réservée aux duchés de Lorraine et de Bar, ainsi qu’aux Trois-Évêchés (Metz, Toul et Verdun).
Dans la lignée des travaux initiés par Roland Mousnier et réalisés par Pierre Grillon, publier les papiers de Richelieu au format traditionnel d’édition de textes répondait à trois enjeux méthodologiques : leur mise à disposition auprès des enseignants-chercheurs, des chercheurs, des doctorants, des étudiants de niveau master 1 et master 2, d’un public averti, au plan national comme au plan international ; la mise en valeur de leur richesse intrinsèque par une première exploration ou exploitation ; la mise en lumière de leurs corrélations. Six premiers volumes ont ainsi vu le jour (période 1632-1635), aux éditions L’Harmattan. La publication avec ISBN ne peut cependant proposer qu’un ensemble restreint de documents. Elle contraint à opérer des choix et à renoncer à nombre de textes, qui n’en conservent pas moins tout leur intérêt historique.
La publication en ligne offre aujourd’hui un espace de diffusion inégalable. Le carnet Hypothèses « Richelieuletters » propose désormais à tous les lettres, papiers d’État et documents de travail du cardinal de Richelieu restés inédits pour la période 1632-1642. Il a aussi pour objectif de corriger et de compléter les six volumes précédemment publiés.
Choix a été fait de moderniser la ponctuation et l’orthographe des textes originaux d’une part pour en faciliter la compréhension et la lecture, d’autre part pour rendre les recherches sur nom propre plus efficientes, tout en respectant, en revanche, les structures syntaxiques comme reflets des modes de pensée et de niveaux d’éducation. La rupture méthodologique répond à la volonté de mieux faire connaître un ensemble de sources historiques difficilement accessibles sous leur forme manuscrite, d’ampleur exceptionnelle, et d’éclairer le ministère du cardinal de Richelieu, le règne de Louis XIII, plus généralement, la première moitié du XVIIe siècle en France et en Europe, à l’époque de la guerre de Trente Ans, grâce à l’apport d’archives trop souvent négligées. Beaucoup de textes concernent les duchés de Lorraine et de Bar, ainsi que les Trois-Évêchés. L’œuvre de Richelieu, et, à travers elle, celle de nombre de contemporains, des plus illustres au plus obscurs, restent moins connues qu’on ne pourrait le croire. Les papiers laissés par le cardinal-ministre sont encore loin d’avoir révélé toutes leurs richesses.